François Calay

Peut-on désobéir à des lois si elles sont injustes ?

Désobéir ... pourquoi ?
interdire

Pour certains, c'est une question de conscience personnelle, et de survie, dans un système collectif éventuellement inadapté.
Pour d'autres, c'est motivé par le besoin de transgresser une loi pour se sentir libre et ou vivant.

Peut-on désobéir ?

On peut désobéir, lorsque c'est nécessaire, mais ce n'est pas sans risque d’être sanctionné.

Tout dépend
- des risques encourus
- du courage de l'individu qui désobéit
- de son niveau de conscience
- ... ou de son inconscience
- et de son degré de liberté intérieure.

Pour ma part, j’essaie de respecter les lois, par civisme et respect d'autrui.
Mais si celles-ci me paraissent injustes, liberticides, corrompues, profondément inadaptées, alors je peux être parfois amené à me poser la question de la transgression.

Exemple : que faire au Danemark, sur une route nationale en pleine nature, en présence d'une limitation de vitesse à 20 km/h aux abords d'une école, en période de vacances à deux heures du matin ?

Doit-on désobéir ?

Si l’on part du principe que la loi et la morale sont deux notions distinctes - je pense qu’elles le sont - alors désobéir à des lois injustes est non seulement une possibilité, mais presque un devoir.

Un exemple-type de désobéissance obligée est la situation dans laquelle la survie personnelle, ou celle de gens proches, est en jeu.
Par exemple, la délation sous l’occupation allemande. Cacher des juifs était un délit, et pourtant, ceux qui l’ont fait sont aujourd’hui reconnus comme des “Justes”. C'est le cas d'une de mes tantes, Eva Calay.

Quelques autres exemples de désobéissances civiles (justifiées ou non) :
Ghandi
Martin Luther King
Greenpeace
La lutte contre la peine de mort aux USA
La lutte du Larzac
Les faucheurs volontaires

Et plus récemment ...
Les gilets jaunes

Lois justes ou injustes ?
chemin

Comment qualifier le fait qu’une loi soit juste ou injuste ?

Par définition, c’est la Loi qui définit ce qui est
- permis
- obligatoire
- interdit
et ce, uniquement dans la société où elle s’exerce.
Et c'est la Justice de cette société qui est chargée de faire appliquer la Loi.

Dans les démocraties, la Loi est en principe définie, rédigée et diffusée, par le système de pouvoir qui reflète avec plus ou moins de succès la culture dominante. Car le système électif met (généralement) au pouvoir des individus représentant l’opinion et la culture majoritaire.
Mais ce pouvoir est obligé de tenir compte des minorités, sous peine d’émeutes !
Le résultat est généralement un compromis, dont le niveau dépend du rapport de forces pouvoir - opposition.
Le ressenti de l’injustice d’une loi émane donc d'un jugement personnel et subjectif, qui peut être partagé par un certain nombre.

Le malheur, c'est que certaines lois sont inadaptées : elles peuvent avoir été décrétées par des exigences économiques ou politiques, basées sur la course aux nouvelles taxes, ou un reflet d’ignorance, d'incompétence, d'intérêts partisans, voire de corruption.
Les exemples ne manquent pas, et pour illustrer mes propos, je citerai une incohérence "à la Belge" qui m'avait beaucoup amusé il y a une vingtaine d'années : une infirmière (bien sympathique par ailleurs) s'était retrouvée au poste de ministre de la mobilité et des transports. Pendant ce temps, un professeur de géographie était ministre de la santé ...

Obéir à quelle morale ?

« La vraie morale se moque de la morale », écrivait Pascal.
Je crois qu'il y a un temps pour tout : il faut parfois sauver son prochain sans avoir le temps de réfléchir, mais à d’autres moments il faut prendre le temps du doute, comme Descartes, tout en gardant à l'esprit la parole de JJ Rousseau : "l’obéissance à la loi qu’on s’est prescrite est liberté".

Les paradoxes
200

En Allemagne, pays actuellement à la pointe de l'écologie, de la sécurité, et du respect d'autrui, la vitesse maximale sur autoroute n'est pas limitée, sauf sur certains tronçons définis, et en dehors des abondants embouteillages.
On peut donc y rouler légalement à plus de 200 km/h, ce qui est cautionné par le pouvoir, la société allemande, et les constructeurs automobiles, comme quelque chose de bien et de nécessaire (voir photo).

En Belgique, la vitesse autoroutière maximale est de 120 km/h. Certains politiciens parlaient récemment de relever le seuil à 130 km/h. Ils furent violemment critiqués, on les a traités de tueurs, d'inconscients, de pollueurs ...
Rouler à 200 km/h en Belgique est sanctionné par un retrait de permis, par une amende dépassant le millier d'euros.

Donc, celui qui franchit à 200 km/h la frontière à Eynatten, entre Aachen et Liège, passe du statut de citoyen respectable (côté allemand) à celui de truand (côté belge). Et pourtant, derrière le volant, se trouve la même personne, qui conduit de la même manière la même voiture, avec même une plus grande sécurité côté belge puisque les autoroutes y sont moins encombrées et abondamment éclairées ... car la Belgique, qui souffre de vieilles centrales nucléaires souvent à l'arrêt, achète du courant à l'étranger pour éclairer ses autoroutes vides la nuit.
Comme quoi, tout est question d'idéologie, voire d'illusions ... et parfois ... de corruption morale ou matérielle.

Plus je vieillis, plus je perçois que les choses et les pseudos vérités sont sous-tendues/contrebalancées/motivées par leur véritable aspect caché, qui est souvent totalement opposé.
Tout est équivoque. La vie est pleine de paradoxes, de manipulations, de mensonges cachés (volontairement ou non).
Si quelqu'un, officiellement détenteur du savoir ou du pouvoir, affirme une vérité, de quelque ordre qu'elle soit, je suis persuadé qu'il en existe une contre hypothèse tout aussi valable.

La sentence

En ne respectant pas une loi, de quelqu'ordre qu'elle soit, ... on se heurte au risque de la sentence ...
Les hommes ont une imagination créative pour les sentences : la fessée, la privation, l'humiliation, le péché, le préavis, l'amende, la prison, l'exil, la peine de mort, la torture, le camp d'extermination.

Et les amendes routières ?

Quelques exemples - tout est relatif, et dépend du niveau moral du pays concerné :

Dans les pays scandinaves, les amendes routières sont proportionnelles aux revenus du contrevenant.
Dans d'autres pays plus corrompus, l'amende est une participation financière à l'augmentation du niveau de vie du policier qui la constate.
Et en d'autres lieux, tels par exemple certaines îles d'Ecosse, les amendes n'existent pas et c'est la sagesse et le respect d'autrui qui prédominent.

Il faut donc bien s'adapter au lieu où on se trouve, ne pas commettre d'impairs.

Dans certains pays, on mange du chat (Chine, Corée)
Dans d'autres temps, les chats furent une divinité (Egypte, Bali)
Mais on peut aussi trouver des panneaux routiers qui les concernent, afin de les respecter dans les quartiers résidentiels (en Suède)

La morale apparaît comme quelque chose de très variable suivant les époques et les lieux ...

chat_en_Suède

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"Il est interdit d'interdire"
Mai 68


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